Le hameau de Vignols était jadis le grenier à blé de Roubion. Disposant de vastes surfaces cultivables, il fournissait blé et seigle pour la fabrication du pain et l’orge pour le bétail, sans oublier les pâturages pour les troupeaux en estive. L’éloignement du village obligea les paysans à bâtir des granges bien intégrées dans ces magnifiques paysages. Aujourd’hui, Vignols vit au rythme des randonneurs, du parc national, de quelques résidents secondaires, des activités pastorales et parfois du lâcher de jeunes Gypaétes Barbus (rapace mythique en voie de réintroduction).
Depuis 1993, les parcs du Mercantour et Alpi Marittime réintroduisent alternativement au printemps des gypaètes nés en captivité. Agés de 90 jours, les poussins sont nourris par les gardes, qui surveillent leur premier envol à l’âge de 4 mois. Le site de Vignols a été choisi comme aire de réintroduction. Les années de lâcher, la zone des rochers ruiniformes est protégée et interdite d’accès.
Aucun adulte ne serait installé dans l’Argentera-Mercantour, mais des jeunes le survollent au cours de leur vie erratique. Ils parcourent parfois de100 à 200kms par jour et effectuent de vastes migrations couvrant tout l’arc Alpin avant de se sédentariser.
L’objectif du plan de réintroduction est qu’un couple s’installe définitivement dans le Mercantour.
A l’âge de 6-7 ans le Gypaète devient adulte et rapace. Il s’installe en couple dans des niches de falaises inaccessibles. Dans un nid volumineux, la femelle pond, au cœur de l’hiver, 1 ou 2 œufs. Après 52 à 60 jours d’ incubation, de fragiles poussins voient le jour; un seul survivra, le plus fort tuant le plus faible après quelques semaines (phénomène de caïnisme).
Près de 80% de leur nourriture est faite d’os et de ligaments. Il laisse tomber les os les plus gros d’une hauteur de 50 à 100m sur un plan de falaise oblique ou sur un pierrier, de sorte que ceux-ci se brisent. Il mange alors les débris. Il avale néanmoins d’une seule pièce des os allant jusqu’à la taille d’une vertèbre de mouton ou d’une patte de chamois. Son appareil digestif est le seul capable de supporter une telle alimentation. Il n’a pas à subir la concurrence et profite d’une nourriture 15% plus riche que la chair.
Le Gypaéte est aux airs ce que le bouquetin est aux rochers: un maître incontesté. Il accompagne d’un sifflement aigu les acrobaties aériennes qu’il exécute lors des parades nuptiales.
Ils vivaient autrefois dans presque toutes les montagnes du sud de l’Europe et des Alpes. Aucun rapace n’impressionnait autant les gens qui le rencontraient comme en témoignent de nombreuses fables et légendes.
On lui attribue la responsabilité de la mort du poète grec Eschyle. En 456 avants JC, il fut tué par une tortue lancée du ciel par un gypaète !